L’association Prévention routière lance un site Internet et une campagne choc de sensibilisation aux accidents de scooters. Problème, les mesures répressives proposées ne convainquent pas.Quand les vieux vilipendent les jeunes
Un « permis scooter » à points pour conduire un 50 cm3, un contrôle technique pour lutter contre le débridage… Quand la Prévention routière et la Fédération française des sociétés d’assurance (FFSA) proposent des mesures de lutte contre les accidents des ados en 2-roues, elles n’y vont pas par quatre chemins.
« Nous demandons que le Brevet de sécurité routière (BSR) devienne un véritable permis de conduire avec un examen », plaidait Bernard Gustin, délégué général de l’association, au micro de RMC jeudi matin, lors du lancement de la campagne « Mortel Scooter », dont le site web éponyme nous a fait frémir (lire l’article Un site moralisateur pour les jeunes).
http://mortelscooter.fr/
« Les jeunes nous disent que le BSR, c’est de la foutaise », renchérit Stéphane Pénet, de la FFSA. « Nous demandons donc que ce soit un vrai permis, un permis à points. »
Contrôle technique moto, le retour
Les deux hommes vont plus loin. « Il faut mettre en place un contrôle technique des deux-roues motorisés, pour éviter le "kitage" qui donne lieu à des accidents très graves », revendique Pierre Gustin.
La Prévention routière et la FFSA déplorent que 105 cyclomotoristes âgés de 14 à 17 ans soient morts sur les routes françaises en 2007, et 5.751 aient été blessés. Ils ont raison. Mais la solution répressive prônée avec fracas n’est pas celle qui aura le plus d’impact sur une population, les adolescents, rétive à l’autorité.
« Plus c’est interdit, plus ils bravent les interdits », répond Akim Benhamel, spécialiste de la problématique adolescente à l’Association de formation des motards (AFDM), affiliée à la FFMC. « Regardez l’effet du permis probatoire à six points : à 18 ans, de nombreux jeunes roulent sans permis ! Quant au contrôle technique, ils vont présenter le scooter aux normes et ensuite, ils le débrideront pour rouler. »
Éduquer à temps ou réprimer trop tard ?
Le mouvement FFMC planche depuis des années sur cette problématique. Sa commission Éducation Routière et Jeunesse réunit des éducateurs, pédopsychiatres, la Mutuelle des Motards et l’AFDM. Parmi ses propositions figure le principe de « continuum éducatif », dont l’objectif est d’éduquer l’enfant au risque routier dès la maternelle, en prodiguant une heure de cours par semaine.
« Le programme doit être basé sur les changements de comportement, il faut favoriser le travail de groupe, poursuit Akim. Axer le travail sur la répression, c’est le symptôme du refus de la formation. »
L’AFDM propose d’ailleurs, via son réseau de moto-écoles (sur http://afdm.free.fr/), un « BSR + » de 12 heures (au lieu de 3 heures pour le BSR officiel), avec beaucoup de pédagogie en salle de cours.
Bridage anachronique
La FFMC réfute également l’utilité du bridage des engins de 50 cm3 à 45 km/h. Rouler à cette vitesse au milieu de voitures et camions qui atteignent jusqu’au double en rase campagne ne constitue en effet pas un gage de sécurité.
Pour améliorer la formation, la FFMC préconise de « porter le BSR à 12 heures et le rendre accessible à tous par des aides financières aux familles modestes. » Il faut en outre impliquer les parents : « Si les jeunes vont à l’auto-école et voient ensuite leurs parents conduire n’importe comment, ça va pas », explique France Wolf, membre du bureau national de la FFMC.
Ces mesures proposées par l’association de motards sont moins portées sur la répression que sur la formation. Une telle position est-elle dans l’air du temps ? Pas vraiment. Taper sur des doigts gantés a plus le vent en poupe. La Prévention Routière, association subventionnée par l’Etat, l’a bien compris.
Nicolas Grumel -MOTOMAG 30/10/2008